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Et moi ? Allons, ne nous esquivons pas… Ce n’est plus l’heure !

Elle est morte surtout à cause de moi. J’ai été un être répugnant ; je me suis présenté à l’autel avec des mains de goujat. C’est moi, c’est moi qui ai donné le grand coup sur sa pauvre tête, le grand coup fatal.

C’est bien, nous allons régler ça.

Et pas de mise en scène : je mérite une sale mort.

Une chose m’embête ; c’est de songer que ceux qui me relèveront, la gorge ouverte, diront :

— Pauvre diable !… il a manqué de courage.

Tas de pleutres !

Je ne voudrais pas que l’on me relevât… Si je flambais ma tanière ? C’est possible : j’ai du pétrole… J’en arroserai ses lettres, mon cahier, des journaux, ma paillasse ; je jetterai une allumette et crac ! Mon rasoir est à lame mince, sans rebords ; il entrera tout entier. Voici l’artère… en tirant fort je couperai en même temps la trachée au-dessous des cartilages… Et mon sang giclera, mon sang épais de bête mauvaise.

Allons ! tout de suite…

Qui vient ?

C’était le facteur… une lettre… On m’écrit ; c’est drôle… écrire à un mort… car je serai mort dans cinq minutes… Je ne déchirerai pas cette enveloppe… D’où vient-elle ?