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Comme nous prenons plaisir à nous tracasser mutuellement ! Et pourquoi ? Et pourquoi ?

Il sera bien avancé, M. Alliez, quand il m’aura fait souffrir injustement et inutilement ! Qu’est-ce que cela lui fera ?

Dans quarante ans, qu’est-ce que cela lui fera ? Que lui feront les programmes, la discipline, l’autorité, et tout, et tout ? Qu’est-ce que cela lui fera quand il sera étendu entre quatre planches de chêne, dans un cimetière de village, dans un petit « gardin grign’dints » du pays des Flandres, en plein dans la terre grasse ?…

Pourquoi, hier, ai-je fait pleurer de pauvres petits yeux dont quelques-uns se fermeront prématurément, bientôt peut-être ? Pourquoi hier, ai-je puni, pour une raison futile, dix écoliers ? Qu’est-ce que cela leur fera, les leçons, quand ils seront morts ? Et la vertu, le progrès, les grandes vies exemplaires, l’immense peine des hommes, à quoi cela rime-t-il ? Est-ce que cela comptera quand les derniers enfants des hommes seront morts ? À quoi bon ? À quoi bon ?…

Sur ma table, entre deux bouquets de violettes offerts précisément par ces bons petits que j’ai fait pleurer, une photographie, un portrait de Josette. Elle me regarde avec des yeux tendres et moqueurs. Saurait-elle le mot de l’énigme ?

Elle me dit :

— Je ne sais rien qu’aimer. Je suis jeune et belle