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ciles… As-tu de l’argent au moins ? Pourras-tu seulement lui acheter une robe ?

— J’économise… l’an prochain je gagnerai quatre vingt-quinze francs par mois…

— Quatre-vingt-quinze francs ! Vous crèverez de faim.

— Et qu’importe ! Nous nous aimons, entends-tu, prophète de malheur ! D’ailleurs mon amie est… n’est pas… son père est cossu, enfin !

— À la bonne heure ! Que ne le disais-tu ? Tu as raison de te hâter.

— Tu te méprends sur mes paroles ; avant de te rencontrer je n’avais nullement pensé à cela et je l’oublierai tout à l’heure.

— Mon camarade, ne perds pas de temps. Cours, cours à la dot. Sus à l’héritière ! Hé ! malin ! je te reconnais enfin !

— Trêve d’insultes !

— Trêve d’hypocrisie !

— Ne mesurez pas mon âme avec la vôtre. Je l’aime ; vous ne pouvez pas comprendre.

— Tu l’aimes, je ne dis pas autre chose. Tu aimes ses yeux jolis, sa bouche fraîche… et le tintement de ses écus est une chanson douce.

— Sottise ! mensonge !

— Avoue que tu l’aimes aussi parce que c’est une demoiselle cossue ; tu l’as dit toi-même. Elle joue du piano, elle est d’esprit cultivé, elle sort du couvent…