mariée à un pauvre cultivateur, ne lui est pas non plus d’un grand secours. Comme elles habitent le même hameau, c’est plutôt maman qui aide Juliette.
Les six mois que je viens de passer là-bas, aux Écotières, ont été durs. S’il me fallait recommencer, je me ferais portefaix, ramoneur, vidangeur, n’importe quoi.
Mon beau-frère qui ne m’aime pas m’horripilait avec ses façons de m’appeler « le bourgeois ». Lui, travaillait quinze heures par jour. Je l’ai aidé. J’ai fait des besognes simples et pénibles qui n’exigent pas d’apprentissage. J’ai bêché son jardin, j’ai aplani son aire, j’ai terrassé, roulé du fumier, épandu de la chaux, vidé la fosse à purin, curé la mare. La veille de mon départ, j’ai descendu du grenier et mis sur une charrette, quarante sacs de blé, quarante balles de cent kilogs.
Malgré cela, il ne s’est pas passé de jour où je n’aie entendu de lourdes allusions à mes mains blanches, à ma vie qu’il fallait bien gagner. Oh ! je l’ai gagnée ! L’orgueil qui est en moi m’a rendu capable de fournir le travail de deux manœuvres ordinaires.
Ma pauvre maman qui se priverait de manger pour que je sois à l’aise s’est brouillée trois ou quatre fois avec son gendre à cause de moi.
Heureusement, me voilà sorti de cette géhenne. Maintenant, je suis un bourgeois en effet. On m’ap-