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drais effacer de ma vie de naguère, de ma vie d’avant l’amour, quinze détestables journées.


18 janvier. — (Résolution ferme : dès demain… etc, etc.) Mon lit a ceci d’original qu’il ressemble à un fauteuil en équilibre sur ses deux pieds de derrière. Comparaison absurde pour qui ne connaît pas mon intérieur ; comparaison exacte cependant, fâcheusement exacte.

Le centre de ma paillasse s’est définitivement effondré ; je couche en équerre, le derrière au sommet de l’angle et les orteils sur ma ligne d’horizon.

Cela ne va pas sans inconvénients par ces temps lugubres. Le soir je réussis à me réchauffer parce que je suis jeune et parce que j’ai un système de ficelles assez ingénieux par lequel la majeure partie de mes couvertures est retenue au pied du lit ; mais le matin j’ai froid et cela m’encauchemarde.

Tantôt, j’escalade le mont Blanc et j’ai oublié mes souliers chez le guide ; tantôt, ayant à me plaindre de l’inspecteur qui veut m’obliger à porter les sandales des bergers d’Arcadie, je vais à Paris trouver le ministre, à pied, par la voie d’eau. Je me marie souvent depuis quelques semaines, mais c’est en Laponie avec la vieille Urda. Dans notre trou de neige Verdandi prépare l’eau d’une bouillotte, lentement, lentement, avec ses drôles de petits cailloux,