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éléments d’un portrait dans le genre de ceux de La Bruyère. Que ne vit-il encore, ce vieux ! J’irais le trouver et je lui dirais :

— Bonjour, grand-père ! Laisse là ton fourbe, ton fâcheux et ton libertin. Prends une plume de tourterelle : tu vas me faire un beau portrait de jeune fille.

Je t’apporte tout ce qu’il faut. Elle aura vingt ans aux violettes prochaines ; ses yeux sont le ciel, ses cheveux sont de la lumière attendrie, sa gorge est blanche comme un rayon de lune ; rien au monde ne serait plus beau que sa bouche si son rire n’existait pas.

Voilà ! choisis, arrange ; à toi de te débrouiller. Je t’apporte des lis, je t’apporte des roses ; j’ai aussi d’autres fleurs aussi suaves et moins communes, telles que bluets, jasmins et pivoines ; j’ai peut-être même fauché au jardin chanceux de mon rêve des fleurs excessives et de mauvais goût.

Avec tout cela fais-moi un bouquet harmonieux. J’en veux respirer seul le délicat parfum. Et je te choisis entre d’adroits artisans parce que tu es un bonhomme correct, sans vilaines manies : j’espère que tu n’iras pas, entre les pétales de velours, fourrer ton vieux nez…

Je lui dirais cela et il ferait sans se presser, soigneusement, le beau portrait que je suis trop gauche pour tenter…

Mardi soir notre entrevue a été brève, mais lors-