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tombeaux, où les princesses de leur sang trouvaient une retraite, soit qu’elles prissent le voile, soit qu’elles cherchassent seulement pour quelques années le repos du cloître. On y vit six infantes de Castille, trois d’Aragon, une de Navarre, une de Portugal, une d’Autriche. De leur côté, les papes ne purent refuser ces honneurs étranges aux filles d’une race royale qui soutenait contre les infidèles une croisade de huit cents ans. Nulle part plus qu’en Espagne les femmes n’eurent besoin d’être protégées par le respect, parce que nulle part ne leur manqua davantage la protection de l’épée, le rempart de la famille ; nulle part elles ne furent condamnées à une plus longue solitude, à des veuvages plus certains, quand une guerre éternelle retenait leurs maris et leurs frères. Le moyen âge honora partout les femmes chrétiennes en France et en Italie, il mit à leur service des guerriers et des poëtes en Castille, il rangea sous leurs lois des religieux et des prêtres.[1]

Vous me reprochez probablement de discourir devant les grilles de l’abbaye, au lieu de vous laisser

  1. Il faut voir, dans le mémoire de M. l’abbé Calvo, l’ordonnance royale du 22 janvier 1728 par laquelle le roi Philippe V confirme les privilèges de l’abbaye de las Huelgas, en rappelant les concessions des papes Clément III, Grégoire IX, Innocent IV, Innocent VIII, Léon X, Pie V, Urbain VIII. Il est vrai qu’on ne donne pas le texte de ces concessions, et qu’en même temps on voit la royale abbaye plaider contre les archevêques, se faire délivrer des consultations par les docteurs; ce qui prouverait que ses droits pouvaient être contestés.