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devait devenir par excellence l’homme de Dieu. Aussitôt que l’évasion de l’archevêque fut divulguée, le roi d’Angleterre somma ses évêques de tenir leur promesse, et fit partir quatre d’entre eux pour aller poursuivre devant le souverain pontife la déposition de leur primat. En même temps il adressa des lettres à plusieurs princes du continent, pour leur montrer dans son ennemi l’ennemi commun de toutes les couronnes, et lui fermer ainsi la porte de tous les empires.

Les quatre prélats anglais, ayant passé la mer, se rendirent a Sens, où le pape Alexandre III résidait alors. Là, l’éloquence de leurs discours, le crédit du roi dont ils étaient les mandataires, et aussi les riches présents qu’ils distribuaient, leur concilièrent au sein de la cour romaine de nombreux partisans. ils exposèrent avec beaucoup d’habileté le sujet de leur ambassade, et conclurent en demandant l’envoi d’un légat a latere en Angleterre, avec pouvoir de juger la cause et de prononcer la condamnation de Thomas. Mais l’incorruptibilité du pape était au-dessus de toutes les séductions. La vérité ne lui était point inconnue il comprenait d’ailleurs la portée d’une telle demande, et quel pourrait être le rôle d’un légat dans un royaume où « résister au monarque, c’était faire comme un homme en prison qui résisterait à son geôlier.[1] » Il refusa donc de pren-

  1. Ces paroles sont de S. Thomas lui-même. Quadrilogus, lib. V.