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avec plus de faiblesses ; jaloux de son savoir pédantesque, comme elle l’était de sa fabuleuse beauté ; voulant, lui aussi, faire trembler, mais tremblant lui-même ; s’attachant à de frêles créatures, entre les mains desquelles il abandonnait le sceptre, et qui le laissaient tomber dans la boue. Sous lui, le peuple anglais apprit à dédaigner la majesté des rois ; le parlement, ne se sentant plus guidé par une main ferme, prit une attitude ombrageuse ; la cour garda ses habitudes adulatrices, mais l’encens qui s’y brûlait s’adressait moins au monarque qu’aux idoles qu’il avait élevées à ses côtés, et qui disposaient de sa puissance.

François Bacon n’avait point reçu le prix du sang. On dit même qu’à ses importunités, devenues plus pressantes depuis la mort d’Essex, la reine un jour avait répondu « Quelle autorité peut avoir comme magistrat celui qu’on méprise comme homme ? » A l’entrée du nouveau règne, âgé de quarante-deux ans, il demeurait délaissé et les mains vides au dernier échelon de la hiérarchie. Il voulut se préparer des destinées plus prospères par une étude approfondie des secrets de la fortune ; et quelque temps après, il donna le résultat de ses réflexions dans un opuscule intitulé : Faber fortunae suae. Cet écrit offre, sous de modestes dimensions, un traité presque complet d’ambition pratique (Doctrina de ambitu vitae , comme l’appelle l’auteur lui-même). Nous croyons