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sujets attachés à l’ancienne croyance une persécution sans pitié, et livra au barbare supplice des traîtres une foule de personnages illustres par leur naissance ou par leur vertu, sans autre crime que d’avoir adoré le Dieu de Marie Tudor et de Marie Stuart : telle était Élisabeth. Autour d’elle rampaient les courtisans ; le parlement tremblait, la nation se taisait, et les princes étrangers frémissaient d’une stérile indignation.

Or, deux ans après l’avénement de cette princesse, et le 22 janvier 1561, il y eut une grande joie dans la maison du garde des sceaux, Nicolas Bacon, maison jadis obscure, mais enrichie, par la faveur d’Henri VIII, des dépouilles du vieux clergé. Un fils lui était né, il reçut le nom de François, et de hautes espérances reposèrent sur lui. Élevé dans l’atmosphère de la cour, il en accueillit facilement les inspirations, et de bonne heure il en prit le langage. Un jour que la reine lui demandait quel âge il avait, l’enfant adulateur répondit sans hésiter : « Juste deux ans de moins que le règne heureux de Votre Majesté[1]. Assurément, si quelque astrologue se trouvait présent à cette réponse, il dut juger que celui qui la faisait était né sous la conjonction de Mercure et de Jupiter, et en tirer un brillant horoscope.

En effet, l'instinct des affaires publiques, mer-

  1. Histoire de la vie et des ouvrages de Bacon, par M. de Vauxelles, t. I.