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Nous nous sommes abandonnés avec trop de complaisance à ces grands spectacles. Il est temps de quitter cet empire de la pensée où tout est grave et solennel, où le temps ne se compte point par années ni par siècles, mais par doctrines et par découvertes, où les nationalités et les individualités s’effacent, tandis que de hautes intelligences, placées de loin en loin, dominent la multitude et servent de jalons superbes à l’œil qui veut mesurer les progrès de l’esprit humain. Descendons sur une scène plus étroite et plus tumultueuse ; assistons au drame des affaires publiques dans un siècle et dans un pays. Nous venons d’entendre l’histoire d’un génie, apprenons celle d’un homme. Élisabeth régnait en Angleterre, elle avait apporté sur le trône un singulier mélange de talents et de vices. A de vastes connaissances laborieusement acquises pendant une jeunesse solitaire, elle joignait une perspicacité et une sagesse politique dignes d’admiration ; elle savait l’art de se faire toujours craindre des grands, et quelquefois aimer du peuple ; il y avait en elle un désir énergique de la gloire et de la prospérité nationales, et peut-être aussi quelque germe de générosité personnelle qui ne tarda pas à se flétrir sous le poids de la cou-