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le dévouement d’une femme rompant deux fois les chaînes de Fernan Gonzalez. C’est le Cid, comme fils, lavant la honte de son père, comme mari, gardant fidèlement à Chimène cette main qu’il lui a tendue sanglante ; comme père poursuivant l’injure de ses filles. Voyez dans le poëme, quand le héros banni quitte Saint-Pierre de Cardeña, l’admirable scène des adieux. « Il prit ses filles dans ses bras,il pleura de ses yeux, tant il soupirait profondément : « Ah Chimène, ma femme si accomplie, je vous aimais comme mon âme ! Vous le voyez, il faut nous séparer en cette vie. J’irai et vous resterez. Plaise à Dieu et à sainte Marie que de mes mains je puisse un jour établir mes deux filles que voici! Plaise à Dieu de me donner bonne fortune et quelques jours de vie, et de faire que vous, femme honorée , vous ayez bon service de moi». Mon Cid et sa femme vont à l’église. Dona Chimène se jette à genoux sur les marches de l’autel, priant le Créateur, du mieux qu’elle sait, de garder de tout mal le Cid Campeador :« Tu es le Roi des rois,dit-elle, et le Père du monde. Je t’adore et crois en toi de toute ma volonté, et je prie saint Pierre qu’il m’aide à prier pour mon Cid Campeador. « Que Dieu le garde de malheur Puisque aujourd’hui nous nous quittons, qu’il nous fasse retrouver dans la vie » La prière était faite et la messe achevée. Voilà qu’il faut chevaucher. Le Cid