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mystères d’un culte nocturne qui finit par éveiller la jalousie des époux et la sévérité des magistrats. La secte de Guillelmine périt, mais elle avait assez duré pour laisser au saint-simonisme moderne la désolante certitude de n’avoir pas inventé la femme libre[1].

Ce n’était pas assez, et le moyen âge, le temps de la scolastique et des dialecticiens infatigables, n’avait pas coutume d’énoncer un principe sans le pousser jusqu’aux dernières conséquences, et de pousser les conséquences dans la spéculation sans forcer les obstacles qui les arrêtaient dans la pratique. En l’an 1500, la chrétienté, déjà si ébranlée, fut encore émue des prédications du frère Dulcin, qui, laissant derrière lui la doctrine commune des Fratricelles, divisait la durée du monde en quatre époques, et venait inaugurer la dernière par l’extermination de l’Église dégénérée, et par l’établissement d’une vie plus parfaite que celle de saint Dominique et de saint François. Car ces deux fondateurs d’ordres avaient de nombreux couvents, où ils portaient les aumônes des fidèles, et Dulcin faisait profession de n’avoir point de couvents, et de ne rien réserver des aumônes, mais de vivre dans la liberté d’une vie errante, dans la communauté de l’Église primitive, et dans la familiarité des femmes, que ses disciples

  1. Muratori, Antiq. ital., Dissert., t. X.