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tait pour élever les dômes et les palais, par lesquels, la commune prenait possession des siècles et s’assurait les respects de la postérité.

Il n’y avait pas jusqu’aux serfs, arrachés par le Christianisme à l’antique esclavage, qui n’eussent trouvé le secret de s’unir pour posséder. Les recherches récentes de MM. Troplong et Dupin ont fait connaître l’économie trop ignorée de ces communautés agricoles de serfs ou mainmortables qui, dès le douzième siècle et jusqu’au seizième, couvrirent pour ainsi dire toutes les provinces de France. Le seigneur étant l’héritier naturel du serf, les serfs prenaient leurs mesures pour que leur succession ne s’ouvrît jamais ; ils remplaçaient des possesseurs qui mouraient par des associations qui ne pouvaient pas mourir. Ces sociétés de pain et sel, comme on les nommait, rassemblaient les membres d’une même famille, vivant du même pain (compani), sous un chef qu’elles appelaient le chef du chanteau. Un vieux jurisconsulte (Coquille, Questions sur les coutumes) décrit de cette vie commune qui relevait le servage de son abaissement en le ramenant à une condition patriarcale. « Selon l’ancien ménage des champs, dit-il, en ce pays de Nivernais, plusieurs personnes doivent être assemblées en une famille pour démener le ménage, qui est fort laborieux. Les familles ainsi composées de plusieurs personnes, qui toutes sont employées chacune selon son âge, sexe et moyens, sont