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Car l’oisiveté est l’ennemi de l’âme… et, si la pauvreté du lieu, la nécessité ou la récolte des fruits tient les religieux constamment occupés, qu’ils ne s’en affligent pas ; car ils sont véritablement moines s’ils vivent du travail des mains. Mais que toutes choses soient faites avec mesure à cause des faibles[1]. »

Assurément on peut reconnaître dans ce peu de lignes quelques-unes des plus bruyantes doctrines qui viennent d’agiter les esprits : l’abolition de la propriété, l’égalité des salaires, l’organisation du travail, la rétribution de chacun, non selon son aptitude, mais selon son besoin. Plus d’un passage de tel discours naguère tumultueusement applaudi, ne semble qu’une page déchirée de cette règle que saint Benoît dictait, il y a onze cents ans, à un petit nombre de pieux disciples, dans la solitude du mont Cassin. Mais saint Benoît savait qu’un tel sacrifice de la personne humaine ne se fait pas à demi. Voilà pourquoi, avec la pauvreté, il demandait la chasteté et l’obéissance : la chasteté, qui supprime l’inégalité des charges domestiques, et qui déracine l’homme de la terre, en le détachant de la famille ; l’obéissance, qui ne lui permet plus de marchander l’abandon de ses biens, après qu’il a fait celui de sa volonté. Mais la pauvreté, la chasteté, l’obéissance, ne sont pas des concessions

  1. Régula S. Benedicti, cap. XXXIII.