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n’avait encore que douze apôtres pour prêcher la foi, qu’il instituait déjà sept diacres pour servir les pauvres. Dans toutes les églises le service des pauvres s’organise avec cette régularité et cette efficacité dont Rome donne l’exemple, quand saint Laurent, sommé par le préfet de la ville de livrer ses trésors, lui présente la foule des veuves, des orphelins et des infirmes nourris par les diaconies romaines. Mais la sagesse de l’Eglise et la sincérité de son amour pour les pauvres éclatent précisément en ceci, qu’elle connaît trop l’étendue de leurs maux, et qu’elle est trop pénétrée de leurs douleurs, pour croire qu’elle parvienne jamais à y mettre fin. Voilà pourquoi elle réhabilite une condition qu’elle n’espère pas supprimer, voilà pourquoi elle entoure la pauvreté des respects de la terre et des promesses du ciel. Les païens, étonnés d’une prédilection si contraire à la nature, reprochaient aux chrétiens de courtiser les foulons, les cardeurs de laine et les cordonniers ; de ne gagner à leur secte que des vieillards imbéciles, des femmes, des gens de basse condition, tous ceux que l’idolâtrie écartait de ses temples comme profanes, et que la philosophie bannissait de ses écoles comme indignes. Mais saint Jean Chrysostôme faisait gloire à ses pères dans la foi « d’avoir exercé à philosopher ceux qu’on réputait pour les derniers des hommes, les laboureurs et les bouviers. »

En effet, la pauvreté avait deux caractères qui la