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riage , ou de les contraindre par mauvais traitements à se déclarer coupables d’un crime capital ? » On a beaucoup cité le divorce de Louis le Bègue : on oubliait que le souverain pontife Jean VIII, venu en France pour sacrer le roi, refusa de couronner la seconde épouse qui usurpait le nom de reine. Ainsi les papes commençaient à troubler la conscience des rois : ils commençaient plus tôt qu’on ne pense communément, longtemps avant les efforts d’Innocent III pour séparer Philippe Auguste de cette Agnès de Méranie qui a fait couler tant de larmes de théâtre ; ils continuèrent, avec plus d’opiniâtreté qu’on ne croit, jusqu’au temps ou ils consentirent à voir le schisme d’Henri VIII plutôt qu’à signer l’acte de son adultère. En effet ; ils ne pouvaient rien de plus grand que de troubler ces consciences qui se trouvaient au-dessus des lois ; que de laisser périr une province de l’Église plutôt que le dogme générateur de la famille chrétienne, plutôt que ce respect des femmes qui fit la dignité des mœurs publiques au moyen âge et qui commença l’éducation de la société moderne. Dans ces querelles où l’on n’a voulu voir que les rivalités des deux puissances, nous trouvons qu’il s’agit de tout le spiritualisme chrétien, et de savoir qui restera maître du monde, l’esprit ou la chair. Il s’agit aussi de toute la liberté. Les papes savaient bien la faiblesse du cœur humain, et que si le libre arbitre n’a pas d’autre refuge, il tiendra