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jamais, dans lesquelles il se meuve et qui demeurent immuables, à la faveur. desquelles il puisse apprécier ce qu’il fut, ce qu’il est et ce qu’il doit être, et mesurer sur cette triple connaissance l’emploi de ses facultés. Or la raison variable et progressive ne peut s’assurer qu’elle possède ces notions immuables et absolues, et qu’elle n’a pas altéré ce précieux dépôt ; elle ne découvre le monde moral qu’à la lueur mouvante du sens intime, elle n’aperçoit les choses passées et les choses futures que dans le rayon et sous la couleur de ses idées présentes; elle mesure tout à elle-même, et ne saurait se mesurer à rien. Aussi dans les doctrines rationalistes, la vérité et la vertu sont-elles relatives, susceptibles de transformations comme l’humanité en qui elles résident ; l’humanité n’a donc pas hors d’elle-même d’unité fixe qui puisse lui servir à connaître sa grandeur et à déterminer la portée de ses efforts : elle est privée de ce point d’appui qu’il faudrait à son levier pour soulever l’univers.

Cependant c’est peu pour la raison de prétendre offrir la preuve et la mesure du progrès, elle veut encore en être la source.- Qu’est-ce donc que le progrès ? C’est une tendance de l’homme qui le fait sortir de sa situation actuelle pour s’élever à une condition meilleure ; c’est une expansion de sa nature, une ascension continue vers un type de bonté souveraine. De même que les corps entrent en mouvement, se dilatent et s’unissent par une force