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CHAPITRE III
LES PREMIERS DISCIPLES DE SAINT FRANÇOIS.
FRÈRE PACIFIQUE. SAINT BONAVENTURE . JACOMINO DE VÉRONE.

L’inspiration poétique peut naître dans le silence de la cellule et jusque sur les rochers déserts où saint François cachait ses ravissements ; mais elle ne se propage que par le rapprochement des hommes, par l’enthousiasme bruyant de la foule, par l’éclat des fêtes qui émeuvent, tout un peuple, et l’arrachent pour un moment aux habitudes triviales de la vie. L’Italie du moyen âge connaissait les plaisirs publics qui entretenaient, en des temps réputés si barbares, la culture et la politesse des esprits. Dès le onzième et le douzième siècle, les empereurs venus pour recevoir la couronne des mains des papes, les rois de Sicile, les marquis d’Esté et de Montferrat, avaient donné à leur cour tous les spectacles chevaleresques, tournois, carrousels, chevaux ferrés d’argent, fontaines d’où jaillissait le vin, salles richement décorées, retentissant du son des luths, encombrées de chanteurs, de mimes, d’improvisateurs en vers qui se retiraient chargés de