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Tel n’est plus le caractère d’un autre poëme cité par saint Bernardin de Sienne, et qu’il attribue à saint François. Bernardin, postérieur d’un siècle au saint fondateur, mais enrôlé dès sa jeunesse dans la famille franciscaine, peut être reçu comme un fidèle interprète des traditions qu’elle avait conservées. Cet ouvrage, divisé en dix strophes de sept vers chacune, d’une construction très-simple, avec un nombre régulier de syllabes et de rimes généralement correctes, trahit bien le travail d’une main habile, peut-être d’un disciple chargé de retoucher l’improvisation du maître. Mais au fond on y retrouve encore toute la hardiesse du génie de saint François, toute la précision de son langage, enfin toute l’impression du grand événement qui marqua sa personne du sceau miraculeux. Je veux parler de cette extase ou le serviteur de Dieu, en prières sur le mont Alvernia, vit venir à lui du haut du ciel une figure ailée de six ailes et attachée à une croix. Et, comme dans cette contemplation il ressentait une consolation inexprimable, mêlée d’une douleur extrême, il se trouva que ses mains et ses pieds étaient percés de clous, dont on touchait la tête ronde et noire et la pointe recourbée. Ceux qui n’admettent rien de surnaturel dans l’histoire peuvent nier ce fait ; ils ne peuvent effacer les dépositions des témoins innombrables qui l’attestèrent juridiquement, ni briser les tableaux de Giotto qui en conservent le souvenir, ni déchirer le poëme