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François achevait à peine sa vingt-quatrième année, livré aux plaisirs avec tout l’emportement de son âge et de son tempérament, quand tout à coup il fut saisi d’une longue maladie. Or, comme il se rétablissait lentement, et qu’un jour, pour reprendre quelques forces, il était sorti appuyé sur un bâton, il se mit à considérer du haut des terrasses d’Assise les riantes campagnes qu’elles dominent mais la beauté des champs, l’agrément du paysage, et tout ce qui plaît aux yeux, n’avaient plus de prise sur son âme. Il s’étonnait d’un tel changement, et, dès ce jour, il devint méprisable à ses propres yeux, et commença à prendre en dédain tout ce qu’il avait admiré parmi les hommes.[1] Il éprouvait cet inexplicable ennui qui précède l’éclat des grandes passions. Vainement le jeune homme s’efforçait d’y échapper en se réfugiant dans la société bruyante de ses amis, dans ses projets de guerres et d’aventures. Les songes de ses nuits l’appelaient à un autre genre de vie qu’il ne comprenait pas un instinct puissant le poussait dans la solitude. Souvent il prenait le chemin d’une caverne voisine, et, laissant ses compagnons à l’entrée, il y pénétrait seul sous prétexte d’y chercher

  1. Thomas de Celano, I : « Cumque jam paululum respirasset, et, baculo sustentatus, causa recuperanda sanitatis, cœpisset huc’ atque illuc per domicilium ambulare, die quodam foras exivit et circa adjacentem planitiem cœpit curiosius intueri ; sed pulchritudo agrorum, amoenitas, et quidquid visu pulchrum est in valle, uon potuit eum delectare. »