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sans savoir. Il lui resta de ses courtes études assez de latin pour entendre facilement les livres saints, et un singulier respect pour les lettres. Ce sentiment ne fut pas de ceux qu’il abjura en se convertissant. Il le portait si loin, que, s’il rencontrait sur son chemin quelque lambeau d’écriture, il le relevait avec soin, de peur de fouler aux pieds le nom du Seigneur, ou quelque passage qui traitât des choses divines. Et comme un de ses disciples lui demandait pourquoi il recueillait avec le même scrupule les écrits des païens : « Mon fils, répondit-il, c’est parce que j’y trouve les lettres dont se compose le glorieux nom de Dieu. » Et, complétant sa pensée, il ajouta « Ce qu’il y a de bien dans ces écrits n’appartient pas au paganisme ni à l’humanité, mais à Dieu seul, qui est l’auteur de tout le bien[1]. » Et, en effet, toutes les littératures sacrées et profanes, que sont-elles autre chose que les caractères avec lesquels Dieu écrit son nom dans l’esprit humain, comme il l’écrit dans le ciel avec les étoiles ?

Toutefois l’éducation littéraire de saint François se fit moins par les études classiques, auxquelles il donna peu de temps, que par la langue française, déjà considérée en Italie « comme la plus délec-

  1. Thomas de Celano, X «< Fili, litterœ sunt ex quibus componitur gloriosissimum Dei nomen . Bonum quoque quod ibi est, non pertinet ad paganos, neque ad aliquos homines, sed ad solum Deum, cujus est bonum. »