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merce supposé du poëte avec les dieux, dans l’invocation qui commençait chaque récit, dans tout cet appareil merveilleux qui fut une tradition sacerdotale, avant de se tourner en lieu commun littéraire. Dante lui-même, après un travail de plusieurs années, où son visage a maigri, finit par y voir une œuvre sainte : il ne doute pas que le ciel n’y ait mis la main ; et, si ses concitoyens lui décernent la couronne poétique, c’est sur les fonts de son baptême qu’il la veut prendre[1]. Il n’y a point de poésie inspirée où l’on ne sente la présence de la religion, comme au parfum de l’encens on reconnaît le voisinage d’un sanctuaire.

Ainsi, dans la descente aux Enfers, je crois reconnaître un épisode théologique, un reste de l’enseignement religieux qui fut la première fonction des poëtes. Or cet épisode a pris deux formes principales. Tantôt l’entretien des héros avec les ombres n’est qu’une révélation des choses invisibles : Ulysse, Énée, Scipion, Sextus Pompée, Tirésias, veulent interroger le destin. Tantôt la visite des Enfers est une lutte héroïque pour leur arracher leur proie : Hercule, Thésée, Pollux, Orphée, se proposent de vaincre la mort.

De ces deux sortes de fictions, si j’étudie les pre-

  1. Paradiso, xxv, 1

    Se niai continga che’l poema sacro
    Al quale ha posto mano cielo e terra
    Si che m’ha fatto per più anni macro.