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Castor, pour lui donner la moitié de son immortalité dans les cieux[1]. Un récit, attribué à Prodicus de Samos, célébrait le pèlerinage d’Orphée et la trop courte délivrance d’Eurydice[2]. La navigation des Argonautes, qui avait exercé tant de poëtes, conduisait Jason au pays des Cimmériens, où s’ouvrait une des portes de l’Enfer[3] . Comment eût-on chanté les malheurs d’Œdipe et les combats des sept chefs devant Thèbes, sans évoquer Laïus ? ° Le début de la guerre de Troie faisait la matière d’une épopée qui n’avait garde d’omettre la mort de Protésilas, et son retour de quelques heures a la vie. Enfin, on lisait encore une description des Enfers dans la Minyade et dans le Retour des héros, ouvrages de Prodicus et d’Augias, bien qu’on ne voie pas le lien qui l’y rattachait[4]. Il semble seulement que la peinture du monde invisible (Nεκυία) était devenue l’épisode nécessaire de toutes les épopées grecques et que la scène mobile de la vie ne pouvait s’y ouvrir sans laisser apercevoir derrière elle le spectacle immobile de l’immortalité. Homère est trop grand pour ne pas obéir à cette grande loi. Ce qui fait l’incomparable beauté de l’Iliade, c’est que tout y, prend part à l’action, les

  1. Photius, Bibliothec., de Cyclicis.
  2. Clément d’Alexandrie, Stromata. Lobeck, Aglaophamus, p. 353.
  3. Argonautic. 1118.
  4. Pausanias, x, 28. Proclus, Chrestomathie VII, 3.