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passion de tout savoir qui le poussait à chercher jusqu’aux dogmes des Tartares et des Sarrasins, ne pouvait ignorer les croyances poétiques de l’Europe chrétienne, il ne pouvait mépriser celles qui charmaient toute l’Italie. S’il avait hanté les écoles des religieux si, comme on l’a cru, il porta quelque temps le cordon de saint François, comment n’eût il pas recueilli ces belles légendes franciscaines, célèbres dès le treizième siècle, et rassemblées bientôt après dans l’aimable livre des Fioretti di san Francesco ? Comment les anciens de l’ordre eussent-ils oublié de lui conter la vision de leur saint fondateur, lorsqu’un jour, épuisé de combats et d’abstinences, il pria Dieu de lui faire essayer dès ce monde la joie des bienheureux dans le ciel ? « Or, pendant qu’il était dans cette pensée, un ange lui apparut environné d’une grande lumière, lequel tenait une viole de la main gauche et un archet de la main droite ; et, François demeurant tout ébloui à l’aspect de l’ange, celui-ci poussa une seule fois l’archet sur la viole, et en tira une mélodie si douce, qu’elle pénétra l’âme du serviteur de Dieu, le détacha de tout sentiment corporel ; et, si l’ange eût retiré l’archet jusqu’en bas, l’âme, entraînée par cette irrésistible douceur, se fût échappée du corps[1]. » Il était difficile de représenter

  1. Fioretti di san Francesco. Delle sacre santé stimate di san Francesco, e delle loro considerazioni. Della seconda considerazione.