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Si nous passons de l’Occident à l’Orient, et qu’il nous plaise d’écouter les récits des hagiographes grecs, nous ne sommes assurément pas près de finir. L’histoire des Arabes, publiée dans la Byzantine[1], contient tout un traité des Visions par songe. Les vies des Pères, recueillies par Moschus et Pallade, sont pleines d’extases et de ravissements d’esprit, où le ciel et l’enfer n’ont plus de secrets pour les anachorètes[2]. J’y remarque surtout l’effrayante vision de saint Antoine. Un géant lui apparut, noir, d’une stature prodigieuse, et dont la tête touchait les nuages. Il étendait ses mains jusqu’aux extrémités du ciel, et sous ses pieds il y avait un lac aussi grand que la mer. Il y avait aussi une multitude d’âmes volant autour de lui et celles qui passaient au-dessus de sa tête étaient recueillies par les anges ; mais celles que ces mains atteignaient tombaient dans le lac. Et il fut dit au saint que le lac représentait l’Enfer, où tombent les âmes corrompues par la volonté de la chair, par la haine et le désir de la vengeance[3]. Mais, pour me borner aux légendes plus connues qui vinrent au retour des croisades édifier la piété des Occidentaux, je n’en vois point de plus célèbre, avec celle de Barlaam et de Josaphat, que

  1. Historia arabica, apud Byzantin. per chronic. oriental p. 22.
  2. De Vitis Patrum auctore Moscho, cap. L. Visio et dictum Georgii abbatis.
  3. Pallad., de Vitis Patrum XXVII. De contemplatione quam vidit abbas Antonius.