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plendissaient avait ébloui ses regards, pendant que des chants harmonieux enivraient son oreille. Revenu à lui-même, Driththelm chercha dans le cloître un autre Purgatoire ; il se plongeait au sein des rivières glacées aucune voie ne lui semblait trop rude pour regagner ce Paradis salué de loin et trop tôt perdu[1] Nous connaissons peu de visions dans les annales ecclésiastiques de l’Espagne, soit parce que les antiquités chrétiennes de ce pays nous sont moins familières ; soit parce que le peuple héroïque de Castille et d’Aragon, toujours sur les champs de bataille, eut trop à faire pour rêver beaucoup. Comment le Cid, si occupé dans ce monde, eût-il trouvé le temps de visiter l’autre ? Au contraire, c’est, le ciel qui le visite, c’est saint Pierre qui vient avertir le héros trente jours avant sa mort, afin qu’il fasse amende de ses péchés. Et comme il veut se jeter aux genoux de l’apôtre, celui-ci ne le souffre point : il convient qu’un si noble Castillan traite en maître avec la mort, en égal avec les saints, et avec Dieu en ami[2]. Toutefois, l’imagination puis-

  1. Bède, Historia ecclesiast. gentis Anglicae , l. V, cap. XIII. Les rapports avec le Purgatoire de S. Patrick sont évidents. Cf. Inferno IX. Dante secouru par l’ange. Ibid., XXV, XXVII. Les flammes parlantes, où sont recélés les conseillers perfides.
  2. Romancero del Cid.

    Moriras en treinta dias
    Desde oy,que esto te fablo :
    Dios te quiere mucho, Cid,