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frayaient la conscience des puissants. En même temps qu’on leur donnait ce redoutable avertissement « que les peines des grands sont grandes, » l’office de chaque jour ne s’achevait point dans les églises sans qu’on répétât tros fois le verset menaçant du Magnificat : Deposuit potentes de sede  ; et les prêtres célébraient cette messe contre les tyrans, qu’on trouve encore dans de vieux Missels  : Missa contra tyrannos.[1].

En Angleterre et en Irlande, la légende pénètre moins profondément dans les affaires, elle reste volontiers à l’ombre du couvent où elle naquit. La tradition du Purgatoire de saint Patrick se rattache aux premiers souvenirs du christianisme chez les Irlandais la vision de Tundale, celle de saint Brendan, leur appartiennent aussi. Au septième siècle, un religieux de la même nation, appelé Fursy, crut sentir son âme détachée du corps, et conduite par deux anges ; un troisième volait devant eux, portant un bouclier blanc et une épée étincelante. Ils traversèrent ainsi les quatre feux de l’enfer et la multitude menaçante des démons. Ensuite Fursy

  1. Muratori, Antiquit. Italic.IV, dissertat. 54, p. 729. La préface de cette messe est admirable : « Omnipotens aeterne Deus, respice propitius in faciem Ecclesiae tuae, quœ de suorum gemit contritione membrorum. Esset namque tolerabilius, si gentili gladio ferienda traderetur, quam christianorum destrueretur incursione malorum. Ne pravis, Domine, poena cumuletur œterna, nobisque eorum sit inféstationibus onerosa, diutius illorum non sine prœvalere severitatem. Per Christum, etc