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valeur des textes apocryphes dont il usait lui-même en relève souvent les anachronismes et les contradictions. Néanmoins, il fait servir ces peintures imaginaires à la traduction d’une doctrine véritable. Il ne s’est point proposé d’écrire l’histoire, mais bien le poëme de la vie des saints. On lui a cruellement reproché ces mensonges : je n’en vois pas d’autres que le mensonge éternel de l’art, le mensonge de la toile ou de la pierre qui veut reproduire, par des traits immobiles, la beauté vivante. Assurément l’artiste n’ignore pas la distance qui sépare l’idéal immortel de cette image froide et muette sortie de ses mains, et c’est pourquoi il ne se contente jamais de ses œuvres. Cependant le peuple ne se trompe pas non plus, mais il se contente il suffit qu’on l’ait mis sur la voie, il fera le reste. Sans doute, il voit bien que la coupole peinte et dorée sous laquelle il prie, si haute qu’on l’ait faite, est bien loin du ciel qu’elle veut représenter ; mais elle en montre la route, et la prière y atteindra[1].

  1. Legenda aurea ,. de resurrectione Domini. Cf. Fabricius, Codex apocryph., p. 282. Le texte primitif est en grec. Grégoire de Tours (Hist. Franc., I, 21, 24) donna déjà une traduction abrégée de l’évangile de Nicodème. Cette histoire, devenue populaire au moyen âge, passa dans toutes les langues et sous toutes les formes littéraires. Au dixième siècle un moine, dont la vision est racontée par Ansellus le Scolastique, accompagna le Sauveur aux enfers, et assista à la délivrance des âmes, qui se renouvelle chaque année. Mais le pauvre religieux revient sous la conduite d’un démon. Cette pièce a été publiée par M. du Méril, Poésies latines populaires , p. 200. Il faut citer aussi le soixante-sixième chapitre