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embrasé engloutit et revomit tour à tour les âmes enveloppées d’un vêtement de feu[1] . Oweins reconnaît plusieurs de ses compagnons d’armes ; son courage se trouble ; il gagne en tremblant un pont jeté sur l’abîme l’étroite planche s’élargit devant ses pas, et le conduit auprès d’une porte qui s’ouvre et laisse voir des jardins magnifiques[2] . C’est l’Eden, perdu par le péché du premier père, habité maintenant par les justes avant leur entrée au ciel. Une longue procession vient recevoir le nouvel hôte, et le mène jusqu’en un point d’où peut s’apercevoir la gloire d’en haut. L’Esprit-Saint en’ est descendu ; il se répand sur l’assemblée triomphante. Oweins se retire purifié[3].

D’un autre côté, quand le romancier conduit Alexandre au Paradis terrestre, on soupçonne sans peine que d’autres pèlerins l’ont précédé. On s’en

  1. On se rappelle le crucifiement de Caiphe, les concussionnaires plongés sous la poix bouillante, et les jeux grotesques de leurs bourreaux, les voluptueux entrainés par une tempête eternelle, le puits des géants. Inferno XXIII, XXIV, XXXI.
  2. Le pont de l’Epreuve, emprunté à la mythologie persane, se retrouvera dans les deux visions suivantes : Dante en a conservé comme une trace au chant XXIII, in fine.
  3. Gens erent de religiun
    Qui firent la processiun...
    Contre le chevalier alerent
    S'ils reçurent et le menèrent
    Od duz chant et duz melodie
    et od le son de l'harmonie

    Cette scène offre une frappante ressemblance avec celles qui terrminent le Purgatoire de Dante le Paradis terrestre au terme des expiations, la procession des vieillards et des Vertus, les chants, les parfums et tes leçons que reçoit le miraculeux voyageur.