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par trop de pénitence. Saint François entra dans l’église, où frère Ruffin prêchait ces paroles : «  Ô mes bien-aimés ! fuyez le monde et laissez le péché ; rendez le bien d’autrui, si vous voulez éviter l’enfer observez les commandements de Dieu, aimant Dieu et le prochain, si vous voulez aller au Paradis et faites pénitence, si vous voulez posséder le royaume des cieux.  » Alors saint François monta en chaire, et se mit à prêcher si merveilleusement sur le mépris du monde, sur la sainte pénitence, la pauvreté volontaire, le désir du royaume céleste, enfin, sur la nudité et l’opprobre de la passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ, que tous ceux qui étaient à cette prédication, hommes et femmes, en grande multitude, commencèrent à pleurer fortement avec une admirable dévotion et componction de cœur. Et non-seulement là, mais dans toute la ville d’Assise, la passion du Christ fut si fortement pleurée tout ce jour, qu’on n’avait jamais rien vu de pareil et ainsi le peuple fut édifié et consolé de l’action de saint François et de frère Ruffin. Puis saint François rendit à frère Ruffin son habit et reprit le sien, et ainsi vêtus, ils retournèrent au couvent de la Portioncule, louant et glorifiant Dieu, qui leur avait donné la grâce de se vaincre par le mépris d’eux-mêmes, et d’édifier les brebis du Christ, en montrant combien le monde est à dédaigner. Et dans ce jour la dévotion du peuple s’accrut tellement envers eux, que bien