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plus de chefs-d’œuvre que bien de rois dans leur palais. Il est vrai que les fresques ont cruellement souffert du temps et de la négligence des hommes. Mais s’il ne reste rien des quatre chapelles décorées par Giotto, on conserve de lui un Couronnement de Notre-Dame, peint sur bois pour l’autel de la chapelle de Baroncelli, où il repose depuis six cents ans, sans que rien en ait altéré la fraîcheur et l’éclat. C’est encore une peinture du ciel, comme les anciens mosaïstes avaient coutume d’en exécuter pour enrichir l’abside des basiliques. Mais ici on peut mesurer toute la différence des temps. Pendant que les anciens mosaïstes, interprètes d’une tradition immobile et d’un monde vieilli, donnaient ordinairement à leurs personnages l’immobilité de l’extase et l’impassibilité de la vieillesse, tout vit dans le paradis du maître florentin. L’action du Christ attendri qui couronne sa Mère, entraîne l’assemblée des élus, et lui prête non plus l’unité du même repos, mais l’harmonie du même mouvement. Toutes les figures, même celles des vieillards, sont jeunes, comme l’art qui les conçut, comme le peuple italien du moyen âge, dans la première fleur de sa prospérité et de son génie[1].

Si les siècles ont maltraité Sainte-Croix, il semble qu’ils aient voulu réparer leurs ravages en lui

  1. Vasari, Vite de Pittori, Vita di Giotto, di Giottino, di Taddeo e d’ Angelo Gaddi, d’Orcagna, etc. Le Jugement dernier d’Orcagna est du nombre des peintures qui ont péri. à Sainte-Croix, est du nombre des peintures qui ont péri.