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elle qui fut notre guide s’est tournée en ténèbres. C’est le corps du clergé qui se fourvoie, et qui a pris le mauvais chemin. Ô Seigneur Dieu qui pourra échapper ? Les étoiles tombées du ciel représentent le corps des religieux. Beaucoup ont quitté la route pour se jeter dans des voies périlleuses. Les eaux du déluge sont montées, elles ont couvert les montagnes et submergé toutes choses. Dieu, soyez en aide, soyez en aide à ceux qui nagent ! –Homme, mets-toi sous les armes, car l’heure est venue fais en sorte d’échapper à cette mort. On n’en vit jamais de si cruelle ; jamais on n’en verra de si terrible. Les saints en furent dans l’épouvante bien insensé me semble qui ne la craint pas[1]. » Mais la satire de Jacopone est en même temps une prédication populaire elle rappelle les hardiesses des orateurs contemporains, accoutumés à déchaîner le ridicule, à réjouir la foule, s’il le faut, pour la convertir. L’insensé de Todi, qui autrefois entraînait à sa suite les enfants et les désœuvrés, afin de les instruire par ses paraboles, continuait maintenant d’évangéliser le peuple par ses vers. Les chants des anges avaient annoncé le Christ aux bergers comment la poésie chrétienne aurait-elle dédaigné les pauvres ? Aussi l’Église, à côté de sa

  1. Jacopone, IV, 14.