Mais, s’il fallut d’abord enchaîner le sentiment pour mettre en liberté l’intelligence, maintenant que l’intelligence est entrée en possession -du vrai, le sentiment brûle de s’unir au souverain Bien. Or, l’âme ne s’unit au Bien suprême qu’autant qu’elle se détache des biens inférieurs ; elle s’élève à mesure qu’elle se décharge et la pauvreté n’est plus seulement l’humble règle des religieux de Saint-François, c’est la loi qui gouverne le monde des esprits. Jacopone connaît trois degrés de dépouillement, qu’il compare aux trois cieux de l’astronomie ancienne. Quand l’âme se dépouille la passion des richesses, l’orgueil de la science et le désir de la gloire, alors, resplendissante des~ vertus, elle est comme le ciel étoilé. Mais sous les étoiles étincelantes les quatre vents se disputent encore l’espace ; et dans l’âme pure s’agitent encore quatre puissances contraires, l’espérance et la crainte, la joie et,la douleur. Si elle rejette ces affections, si elle arrive à ce point où la volonté se détermine sans crainte et sans espoir, où la vertu trouve son mobile en elle-même, dès ce moment elle devient pareille au ciel cristallin, qui ne connaît pas de tempêtes, et dont le mouvement régulier fait mouvoir toutes les sphères. Enfin l’âme, par un dernier effort, peut chasser les images’et les figures qui l'aidèrent à concevoir les choses invisibles ; elle peut se dépouiller de ses vertus mêmes en cessant de les tenir pour siennes, et se réduire au néant. Alors