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représente l’âme de l’homme, et la pierre le libre arbitre, seul bien dont elle dispose souverainement  ; les cinq frères figurent les cinq sens, et le roi est Dieu même, à qui l’âme se donne, et qui à ce prix veut bien la déclarer son épouse. »

À cette époque voisine encore des commencements de l’Ordre, où chacun des couvents de Saint-François avait ses traditions domestiques, ses maîtres préférés dont on retenait les maximes et les exemples, les discours de Jacopone devaient se conserver fidèlement dans la mémoire des religieux de Todi. Ses compagnons racontaient aussi comment il avait réduit en pratique la doctrine du mépris de soi-même et de la répression des sens. Lui qui avait pâli sur les traités d’Aristote et de Cicéron, comme sur les lois de Justinien, refusait maintenant les honneurs du sacerdoce ; il voulait rester frère lai et se réduire aux plus humbles services de la maison. Il gardait le nom dérisoire de Jacopone que le peuple lui avait donné. Accoutumé à tous les raffinements d’une vie somptueuse, il jeûnait au pain et à l’eau ; il mêlait de l’absinthe à ses aliments. Si par hasard quelque mets moins grossier avait réveillé la complaisance de ses sens, il les châtiait par de rudes fatigues. La tradition ajoute un dernier trait qu’il faut reproduire, précisément parce qu’il soulève notre délicatesse, parce qu’on y voit mieux l’énergie implacable et pour ainsi dire sauvage de ce pénitent, résolu de