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faisant le contraire, je l’en aime deux fois plus[1]

Ne nous défions pas de ces transports, comme d’un élan de l’imagination, sans effet pour l’amendement du cœur. C’était au feu de l’amour de Dieu qu’il fallait rallumer l’amour des hommes dans un siècle de haine. Ce jurisconsulte, longtemps mêlé aux querelles des familles, échauffé-de tous les ressentiments qui armaient les villes d’Italie et, pour tout dire, contemporain des Vêpres siciliennes, professait maintenant le pardon des offenses, et réunissait dans une même affection, non plus ses concitoyens seulement, mais les étrangers. Il disait « Je connais que j’aime mon frère, s’il m’offense et que je ne l’en aime pas moins. » Il disait encore « Je jouis du royaume de France bien plus que le roi de France car je prends part à tout ce qui lui arrive d’heureux, sans avoir le souci de ses affaires[2]. » Et, poussant enfin la charité jusqu’au dernier effort, il ajoutait « Je voudrais, pour l’amour du Christ, souffrir avec une parfaite résignation tous les travaux de cette vie, toutes les peines, les angoisses, les douleurs

  1. Rader, Wadding, Bartholomeus Pisanus, Opus conformitatum vitae B. Francisci ad vitam Domini nostri Jesu Christi. Mediolani, 1513, f°53 recto.
  2. Rader. Nam de regno Franciae : ego melius habeo quam rex Franciae quia jucundor de suo bono, et honore, et commoditate, et ipse hanc jucunditatem habet cum multa sollicitudine et multis laboribus et angustiis, quae non habeo ego.