divine. A mesure que la barbarie s’avance, que les esprits deviennent plus grossiers, les cœurs plus durs, il faut bien que l’Église les gouverne par la terreur, qu’elle leur parle la langue qu’ils se sont faite. Si elle les entretient de bûchers,’d’instruments de supplices, c’est qu’elle en voit de toutes parts. Quand les pirates normands, les Hongrois, les Sarrasins, brûlaient la moitié de l’Europe,.je ne m’étonne point de reconnaître le reflet de ces incendies dans l’Enfer des prédicateurs contemporains. Ne les accusez pas de noircir les imaginations : ils les trouvent effrayées, et ne se servent de ces frayeurs que pour régler, pour calmer les consciences. Voilà les modèles auxquels Frà Jacomino s’attache ; et c’est peut-être d’une compilation théologique attribuée à saint Bonaventure, sous le titre de Fascicularius, que le Franciscain de Vérone a tiré la première ébauche de sa cité infernale avec ses feux et ses glaces, les fureurs des démons, et les pécheurs qui s’entre-déchirent.[1] Mais tout n’est pas tragique dans l’enfer poétique
- ↑ Apocalyps., cap. XX.–S. Augustin, de Civitate Dei.lib.XX,
cap. XXII lib. XXI, cap. xx. Saint Grégoire, Moralium, lib. XV,
cap. XVII lib. IX, cap. XXXIX Dialog., lib. IV, cap. XLV.
Saint Bonaventure, Fascicularius, cap. III « Dicitur ignis ille ad
ignem nostrum tanti esse caloris quanti noster ignis est ad depictum ». Comparez ce passage avec les vers de Jacomino :
E siccom’è niente a questo teren fogo
Quel k’è depento en carta, ne’n mur, ne’n altro logo,
Cosi seravo questo se l’a quel fogo aprovo
De lo qual Deo ne guardo, k’el no ne possa nostro