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ouvrier souverain. Enfin il n’y a de jugement que par l’abstraction ; qui néglige les phénomènes passagers, qui écarte les conditions de temps, de lieu, de changement, pour s’attacher aux qualités permanentes, à l’immuable, à l’absolu. Or, si Dieu seul est absolu et immuable, il s’ensuit qu’en lui réside la règle de nos connaissances, comme le principe des existences, et qu’il y a un art divin qui produit toutes les beautés créées, et à la clarté duquel nous les jugeons». Une telle doctrine, au lieu de tout réduire au raisonnement, donne l’essor aux deux facultés qui font les poëtes, et que les philosophes ont trop souvent méprisées ; je veux dire l’imagination et l’amour. D’un côté, en considérant toutes les créatures comme les signes, comme la traduction de la pensée-divine, on arrive à justifier l’imagination de l’homme, qui agit comme Dieu, qui traduit aussi la pensée par des figures, qui remue pour ainsi dire le ciel et la terre, hasarde tous les rapprochements, toutes les comparaisons, pour rendre moins imparfaitement l’idée qu’elle a conçue, et qu’elle désespère de reproduire dans toute sa pureté et toute sa splendeur. De là ce symbolisme dont le moyen âge trouvait l’exemple dans les saintes Écritures, et qui avait passé dans les livres des docteurs, dans les chants de l’Église, dans tous les détails de l’architecture et de la peinture sacrées. Là chaque ornement est un emblème, chaque personnage historique soutient en même temps