Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 4.djvu/238

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reproche fit sa force ; il ne maîtrisa son temps qu’après lui avoir obéi, et sa vie ne nous attache que par la bienfaisante révolution qu’elle sert. A l’entrée du huitième siècle, on était encore en pleine barbarie ;’c’était, en vain que depuis quatre cents ans les Germains erraient au milieu des institutions de la société chrétienne vainement l’épiscopat et le monachisme s’étaient réunis pour l’éducation de ces peuples ignorants. Après dix générations de rois catholiques, les Francs allaient retourner aux idoles. Les sacrifices de Woden ensanglantaient l’autel du Christ, et peut-être quelque temps plus tard, ne serait-il resté qu’un souvenir lointain de l’Évangile, comme une fable de plus dans la mythologie de l’Edda. Voilà ce que fût devenu le christianisme abandonné, comme plusieurs écrivains le voudraient, au libre génie des Germains. Ces esprits indomptés, qui résistaient aux lumières, ne devaient céder qu’à l’ascendant d’un grand pouvoir la papauté l’exerça. Elle avait ce caractère de paternité qu’elle tient de son institution divine ; elle avait la force des idées, les habitudes du gouvernement, avec le prestige du temps et de la distance, et la majesté du nom latin. C’est par là qu’elle maîtrisa les Francs, et par eux le reste des peuples. Le moment décisif fut celui où Grégoire II dicta à Boniface, évêque, le serment d’obéissance. Ce jour-là seulement, Rome vit s’ac--