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d’autres pèlerins d’Irlande le monastère de Saint Martin de Cologne, fondent dans la même ville Sainte-Marie du Capitole, et Sustern au diocèse de Maëstricht. Dans ces institutions, il faut voir autre chose que la terreur d’un mourant ou d’un grand coupable qui cherche à pourvoir au salut de son âme par les prières d’autrui, autre chose surtout que des milliers de vies consumées dans l’oisiveté du cloître et dans l’ennui d’une psalmodie éternelle : il y faut reconnaître l’inspiration religieuse premièrement, mais aussi le dessein d’une sainte politique. Les abbayes du septième siècle, avec leurs populations de trois cents, de cinq cents moines, étaient comme autant de forteresses dont les murs arrêtaient les incursions des infidèles. Elles s’échelonnèrent des bords de la Somme à ceux du Rhin, cernant l’Austrasie par le Nord, la séparant des contrées païennes, et l’enfermant pour toujours dans les frontières agrandies de la chrétienté. Les abbayes étaient des colonies immobiles au milieu du peuple mobile des campagnes. Ces sociétés, qui ne mouraient pas, qui n’abdiquaient pas comme les évêques, qui ne se laissaient pas entraîner comme eux à la suite des rois, qui résistaient mieux qu’eux à la fraude et à la violence ces sociétés obéissantes, chastes, laborieuses, étonnaient les barbares, les retenaient par leurs bienfaits, et les fixaient enfin, ce qui était beaucoup pour les civiliser. Nous avons considéré les abbayes comme des écoles de science