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tres fondements cachés, profonds, placés, ce semble, hors de la portée de la science et qù’on appelé les mœurs. Rome païenne eut aussi des institutions puissantes : seulement le progrès des lois y fut en raison de la décadence des mœurs. Il s’agit de savoir si la société.chrétienne au cinquième siècle présentera le même contraste, ou si le progrès des mœurs y accompagnera le progrès des lois. Je m’arrête deux points qui font toute la supériorité des mœurs, chrétiennes la dignité de l’homme et. te respect de la femme. Les barbares passent pour avoir introduit ces deux sentiments dans la civilisation moderne. Et, en effet, ces hommes errants, ces hommes de guerre, ces chasseurs, habitués à ne reconnaître aucune autorité visible, à ne dépendre que de leur arc et de leurs flèches, apporteront dans le monde, avec une humeur superbe qui foulera aux pieds, pendant longtemps, toute tentative des lois pour les réduire à la servitude civile, le sentiment de l’indépendance, de l’honneur, de l’inviolabilité personnelle. D’un autre côté, ces hommes indomptés reconnaissent aux femmes je ne sais quoi de divin : ils leur demandent des oracles avant la bataille, ils leur portent tours blessures après la victoire, ils s’agenouillent autour de la fatidique Velléda. Ils ont un sentiment que la société romaine ne connaissait pas, qui devait faire la grandeur du moyen âge et porter sa fleur au temps de la chevalerie.