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Je finis en constatant que ce qui sépare le monachisme du monde romain, cette société nouvelle de la société aucienne, ce sont ces trois choses : la pauvreté, au milieu d’une société qui meurt de son opulence ; la chasteté, au milieu d’une société qui expire d’orgies; l’obéissance, au milieu d’une société qui périt de désordre. Voilà ce qui fait la puissance du monachisme vis-à-vis de la société romaine.

Ce qui fait la différence de l’ascétisme chrétien avec l’ascétisme indien, c’est quelque chose de plus profond. Les ascètes païens étaient chastes, pauvres, disciplinés mais il y a deux choses qu’ils ne connaissaient pas et que les ascètes chrétiens :le travail et la prière. Le travail, car les ascètes de l’Inde ne travaillent pas, ils demeurent immobiles ; s’ils occupaient leurs mains, ils troubleraient leur contemplation. Au contraire, les ascètes chrétiens travaillent des mains ou de l’esprit dans les solitudes de la Thébaide, il y avait des forgerons, des charpentiers, dcs corroyeurs et même des constructeurs de navires ; dans les monastères d’Occident, c’est le travail d’esprit qui domine. Saint Augustin, l’établit en Afrique, il fleurit à Ligugé, à Lérins, et il s’étend partout c’est dans ces monastères que les lettres ont un sûr asile. Travailler, non pour soi-même, ni pour ses enfants, ni pour sa femme, mais,travailler d’un travail persévérant pour une communauté, c’est