choisis, les sens humains, les vertus, les passions, en un mot l’encyclopédie morale de l’homme, le Speculum morale de Vincent de Beauvais. Chez toutes les nations occidentales on retrouve ces personnifications, ces allégories sculptées en pierre. Le théâtre espagnol a fait plus il les a mises en scène, en action il leur a donné la parole. Caldéron devait reprendre les sujets de Prudence il personnifie, dans ses Autos sacramentales, la grâce, la nature, les cinq sens, , les sept péchés capitaux, la synagogue et la gentilité, et, par un art merveilleux, arrive à donner la parole à tout ce peuple de statues que le moyen âge avait produites ; il les fait descendre de leurs niches, les montre aux spectateurs assemblés, de telle sorte qu’on y prend intérêt comme à des personnages réels il les mêle à des personnages historiques, et l’on supporte dans les pièces de Caldéron le dialogue d’Adam avec le Péché, et toutes ces autres personnifications qui n’ont pu vivre ainsi qu’à force de génie, de verve et de cet esprit intarissable dont les poëtes espagnols sont remplis. Tout cela se passe, non pas devant des auditeurs choisis, lettrés, non devant un petit nombre de courtisans de la cour de Philippe III et de Philippe IV, rassemblés pour jouir délicatement d’un plaisir d’académiciens, mais devant la foule immense qui encombre la place de Madrid, se presse de toutes parts pour voir d’un bout à l’autre l’allégorie, suivre le drame jusqu’à la fin, jusqu’à ce
Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/358
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.