Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/258

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« ô mon père ! rappelles-tu en ma faveur les Muses que j’ai répudiées ? Ce cœur, consacré maintenant à Dieu, n’a plus de place pour Apollon ni pour les Muses. Je fus d’accord avec toi jadis pour appeller, non pas avec le même génie, mais avec la a même ardeur, un Apollon sourd dans sa grotte de Delphes, et pour nommer les Muses des divinités, en demandant aux bois et aux montagnes ce don de la parole qui n’est accordé que par Dieu. Maintenant un plus grand Dieu subjugue mon âme....Rien ne t’arrachera de mon souvenir, écrit encore Paulin à son ami pendant toute la durée de cet âge accordé aux mortels, tant que je serai retenu dans ce corps, quelle que soit la distance qui nous sépare, je te porterai dans le fond de mon cœur. Partout présent pour moi, je te verrai par la pensée, je t’embrasserai par l’âme ; et, lorsque, délivré de cette prison du corps, je m’envolerai de la terré, dans quel «  que astre du ciel que me place le Père commun, là je te porterai en esprit, et le. dernier moment qui m’affranchira de la terre ne m’ôtera pas la tendresse que j’ai pour toi ; car cette âme, qui, survivant à nos organes détruits, se soutient par sa céleste origine, il faut bien qu’elle conserve ses affections, comme elle garde son existence. Pleine de vie et de mémoire, elle ne peut oublier, non plus que mourir[1]

  1. S. Paulin, Carm. X, v. 18 et seq