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jeunesse de Paulin et lui avait communiqué cet art des vers qu’il avait pousse jusqu’à une merveilleuse subtilité. Riche de son patrimoine et des domaines de sa femme, Paulin avait été revêtu de tous les honneurs : il était arrivé au consulat enfin, il n’était rien où, à de trente-six ans, il ne pût aspirer. Au milieu de ces changements continuels qui ébranlaient le trône des Césars, qui pouvait prouver que le descendant de tant d’hommes illustres ne serait pas appelé un jour à s’y asseoir ? Cependant, à cette époque, en 598, on apprit à Bordeaux que, clandestinement, à l’insu de toute cette aristocratie romaine, dont il était le parent ou l’allié, Paulin s’était fait initier au christianisme et avait reçu le baptême. Devenu chrétien, il s’était retiré dans ses domaines d’Espagne, où il vivait avec son épouse dans la retraite, mais non dans la pénitence déjà détaché des grandeurs de la vie, mais non de ses douceurs et de son prestige, comme on peut s’en apercevoir à cette prière en vers qu’il adressait dès lors à Dieu : « Maître souverain des choses, exauce mes vœux, s’ils sont justes. Que nul de mes jours ne soit triste, que nulle sollicitude ne trouble le repos de mes nuits ! Que le bien d’autrui ne me séduise pas, que le mien serve à ceux qui m’implorent Que la joie habite ma maison ! Que l’esclave né au foyer jouisse de l’abondance de mes récoltes Que je vive entouré de serviteurs fidèles, d’une