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s’introduire dans l’histoire et d’y mêler la poésie. Ces récits de la solitude charmèrent l’âme de saint Jérôme, et il entreprit un jour de les recueillir, d’en former un ensemble et comme toute une suite de tableaux chrétiens. On ignore s’il put remplir son dessein, mais trois de ces vies nous sont restées : celles de saint Paul, de saint Hilarion et de Malchus. Je m’arrête seulement à la première pour vous donner une idée de ces récits qui devaient peupler la Thébaïde, et qui, se répétant dans tout l’Orient et l’Occident, allaiént agiter les âmes désireuses de paix, de repos et de sacrifices. Saint Jérôme raconte cette histoire merveilleuse, que, sous le règne et la persécution de l’empereur Valérien, un jeune chrétien, vivant dans une ville de la basse Thébaïde, âgé de seize ans, et recueilli chez sa sœur, craignant le fanatisme de son beau frère païen, menacé chaque jour, avait fini par abandonner la maison hospitalière pour aller chercher un asile dans les montagnes. Après avoir longtemps erré, il avait enfin pénétré dans un lieu où un rocher presque inabordable offrait une ouverture par où on entrait dans une chambre intérieure assez spacieuse, taillée dans le roc, à ciel découvert d’ailleurs un vaste palmier avait étendu ses rameaux au-dessus de la caverne et formait comme un toit ; au pied de l’arbre coulait une onde claire et rafraîchissante. Paul s’arrêta là, fit de ce lieu son séjour et y vécut jusqu’à l’âge