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mer, qui portez des fardeaux, qui construisez lentement, difficilement, des barques sur lesquelles vos frères iront braver les flots, vous tous, entrez ici je vous expliquerai non pas seulement le γνῶθι σεαυτόν de Socrate, mais les derniers, les plus profonds mystères, le mystère de la Trinité. Voilà le secret de cette éloquence simple. D’autres fois, il se plaît à orner davantage son discours, à donner plus de place à l’art ancien, toujours avec cette forme d’un entretien familier, à faire passer tour à tour ses auditeurs par les plus grands souvenirs de l’Écriture sainte, et aussi par les réminiscences littéraires qui pouvaient gagner les esprits du petit nombre de lettrés qui se trouvaient parmi eux.

Je vous citerai, comme exemple, un discours de saint Augustin, non pas plus éloquent, mais plus curieux peut-être que les autres. C’est une homélie sur la prière, au moment où il vient d’apprendre la prise de Rome par Alaric. Il importe de recueillir les échos que cette grande catastrophe réveilla par tout l’univers, à Hippone comme à Bethléem, alors qu’une foule de fugitifs cherchaient asile sur tous les rivages, ayant abandonné or, argent, trésors, pour avoir la vie sauve. Tant de désastres avaient agité les esprits, et, en Afrique même, les pêcheurs et les paysans, comme dans le sénat de Rome Symmaque et les siens, commençaient à dire que toutes choses périssaient dans les