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tellement abaissé en misérables flatteries les ressources de leur esprit que, si la Providence envoie un grand homme, leur imagination ne leur suggérera plus rien pour le louer, et Pacatus, célébrant Théodose, ne trouvera rien à dire sinon que l’Espagne, en produisant ce prince, a effacé Délos, berceau d’Apollon, et l’île de Crète, patrie de Jupiter.

Ainsi c’est ailleurs qu’il faut chercher les derniers débris, les derniers restes de la parole antique, et peut-être les trouverons-nous dans un second genre moins connu, et cependant encore plus usité chez les anciens : je veux parler de ces déclamations, de ces discours prononcés par des rhéteurs ambulants, qui-allaient de ville en ville avec des morceaux soigneusement préparés pour y servir soit d’exorde, soit de péroraison, et qui, aux sollicitations de la ville, consentaient à improviser, précautions prises, et enlevaient les applaudissements de l’auditoire. Cet usage était bien ancien et montre jusqu’à quel point la Grèce était amoureuse de ces plaisirs de l’oreille auxquels la poésie toute seule ne suffisait pas. C’est ainsi qu’à Athènes on voit paraître, de bonne heure, Hippias, Gorgias, qui font métier d’enseigner, comment on prouve le juste et l’injuste, qui font étalage, pour achalander leur école, de leur art à soutenir une thèse ou à pousser jusqu’au bout une déclamation.