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core été cité par personne, et qui me paraît cependant décisif en cette matière : c’ést un poëme sous le nom de saint Cyprien, qui ne paraît pas être de_ lui, mais qui est certainement de son temps, du temps des persécutions. Le sujet est la résurrection des morts, et les quatorze premiers vers forment une grande tirade monorime dont vous allez juger l’harmonie par le peu que j’en lirai :

Qui mihi rucicolas optavi carmine Musas,
Et vernis roseas titulari floribus auras,
Aestivasque graves maturavi messis aristas,
Succidi tumidas autumni votibus uvas, etc.

Après quatorze vers qui riment en as, cinq riment en o et six en is ; et, d’un bout à l’autre, le poète chrétien qui cherche à graver ses vers dans le souvenir de ses auditeurs, n’a pas trouvé de moyen plus sûr que la rime pour s’emparer de leur mémoire et séduire leur imagination.

Un peu plus tard, le chrétien Commodianus, encore aux temps des persécutions, compose quatre-vingts chapitres Adversus gentium deos, qui ont la prétention d’être des vers. Ils ne valent point ceux que je viens de vous lire. Ils n’ont de l’ancien vers héroïque que le nombre des syllabes, qu’il faut faire longues ou brèves arbitrairement pour obtenir des dactyles et des spondées ; les vingt-six derniers vers forment une longue tirade monorime :

Incolae cœlorum futuri cum Deo Christo
Tenente principium, vidente cuncta de cœlo,
Simplicitas, bonitas, habitet in corpore vestro.