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Marc-Aurèle, le poëte Némésianus, Apulée, et bien d’autres, pour finir par Martius Capella, dont je vous ai fait connaître la savante allégorie des Noces de la Philologie et de Mercure. Le génie des Africains est surtout connu par Apulée, qui, dans son roman de l’Ane d’or, fait bien voir son goût des métaphores obscures, des expressions surannées, des hyperboles téméraires. Apulée charge la prose de tous les ornements de la poésie, il fait de la prose un langage poétique, foulant aux pieds toutes les règles du goût latin. Il semble, en vérité, que ces écrivains africains aient à venger l’injure d’Annibal sur la langue de ses vainqueurs. Mais on ne peut méconnaître, au milieu de ce désordre, je ne sais quoi de fougueux qui se sent de l’ardeur du soleil et des sables du désert. C’est ce qu’on reconnaît davantage quand l’école africaine devient chrétienne ; quand elle produit les plus illustres Pères de l’Église latine et les premiers : Tertullien, que saint Cyprien appelait le Maître, lorsqu’il disait à son secrétaire en parlant de ses ouvrages : « Donnez-moi le Maître ; » puis saint Cyprien lui-même, Arnobe, et par-dessus tous saint Augustin.

Vous le voyez, la littérature chrétienne, dès les premiers siècles, est tout africaine d’origine, et par conséquent elle en a le caractère. Tertullien, le chef de cette école, a aussi tous les torts du génie africain : il n’a pas de calme, et c’est déjà un grand